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Intervention du comité des Bruyères auprès du C.R.A.T.
Commission Régionale d’Aménagement du Territoire


1. Situation historique

Le projet « Itradec » a été présenté en 1997. Notre comité (Comité de Défense des Bruyères) a critiqué l’emplacement choisi
(au centre de trois hameaux ayant une densité de population relativement importante.)

Nous avons alors proposé un projet alternatif dont le principal aspect était d’installer ce type d’usines dans un zoning industriel. Nous proposions un terrain dans le zoning nord, avec accès au canal afin de pouvoir transporter vers les cimenteries d’Obourg, la fraction « Fluff » par barge. Nous demandions également que les pouvoirs publics sensibilisent la population à la problématique du tri des déchets et à l’éco-consommation.

Ces deux projets ont donné lieu à une étude d’incidences réalisée par le Bureau Gosselin & Drumel, qui a mis en lumière les faiblesses de ce projet. Les 2 majeures étant le fait qu’il ne s’intégrait absolument pas dans le paysage et le fait qu’il y avait déjà à l’époque, 760 habitants dans un rayon de 500 mètres.

Gosselin & Drumel ont aussi critiqué le fait que SEUL, le centre de tri avait été soumis à l’étude alors que les deux unités de bio-méthanisation (deux tours de plus de 30 mètres de haut) étaient les bâtiments qui défiguraient le plus le site et qui donc, ne s’intégraient pas dans un développement harmonieux du paysage. En fait, un seul bâtiment sur 18 que comptait le projet a été soumis à l’étude d’incidence. Sans cette technique du saucissonnage, le projet n’aurait jamais été accepté.

Quant à notre projet alternatif, l’IDEA s’est acharnée à le rendre impossible en n’attribuant qu’un terrain en zone inondable et dans le zoning sud ; Le terrain que nous proposions était, soi-disant déjà réservé (option) par une société américaine. Notre comité a contacté cette société qui nous a dit, à l’époque, avoir signalé à l’IDEA dix ans plus tôt qu’elle avait abandonné ce projet. C’est donc par le mensonge que notre projet alternatif a été éliminé.

Nous avons déposé des recours devant le Conseil d’Etat qui, en 2007, a reconnu que notre alternative n’avait pas été assez envisagée et a annulé les permis de bâtir à ITRADEC.

Il est à noter également que les deux organismes consultatifs CWEED et CCAT ont déclaré partager les critiques du bureau d’études concernant le projet « ITRADEC » et ont même ajouté « trouver notre projet alternatif très intéressant et qui mériterait d’être mieux envisagé ! »

Les responsables politiques en charge du projet ont préféré faire du NIMBY en installant cette usine à Havré, loin de leurs communes respectives, où aucune opposition politique forte ne pouvait s’exprimer à l’époque.

L’aventure « ITRADEC » fut un échec total. Sa filière n’a jamais fonctionné. En premier lieu, l’usine miracle qui était sensée trier les déchets n’a jamais été performante, au point qu’en 2006, 77% des déchets triés finissaient quand-même en décharge. La bio-méthanisation fut au moins un demi-échec puisque une des deux installations, 10 ans après sa construction n’a encore jamais été utilisée ! La fraction « fluff », qui devait servir de combustible de substitution (CSS) pour les fours des cimenteries n’a jamais été possible car trop chloré et trop humide. Le compostage fut également un échec car il y avait trop d’impuretés (plastique, verre, cailloux) dans les déchets bio-méthanisés.

Cette usine, qui ne devait coûter que 20 millions d’euros et qui en a coûté le double (entre 35 et 40mions d’euros) a été un échec total, pour ne pas dire un scandale.

2. Les nuisances

Il faut savoir que, dès le départ, le système de traitement de l’air par mise en dépression du bâtiment et filtrage de l’air par bio-filtres n’a jamais fonctionné. Les riverains ont dû subir les odeurs nauséabondes au gré des vents durant 10 ans au point d’être condamnés à vivre les fenêtres closes pour éviter la puanteur dans leur habitation et même renoncer à inviter des amis à partager un barbecue parce qu’ils ne connaissent pas la direction des vents.

En 2006, face au nombre de plaintes, les gestionnaires ont consenti à un nouvel investissement pour tenter de réduire les impacts olfactifs en installant une turbine sur le toit du centre de tri pour pratiquer l’éolage (propulser l’air nauséabond 100 m plus haut pour dissiper les mauvaises odeurs). Ce système n’a pas réduit les nuisances car il était trop onéreux en consommation électrique et ne fonctionnait uniquement que lorsque les riverains se plaignaient trop.

Après l’incendie et la destruction du centre de tri, qu’il faut bien mettre sur le compte de multiples négligences (un camion qui n’avait pas à être là, pas de système de détection d’incendie, pas d’eau en suffisance pour éteindre l’incendie puisque les pompes ne fonctionnaient pas, pas de P.U.I.), les gestionnaires d’ITRADEC ont stocké l’ensemble des déchets ménagers à l’air libre, ce qui a amplifié les nuisances olfactives pour les riverains et était en contradiction avec les promesses faites aux riverains en 1999 (tract de Itradec aux riverains et nombreuses déclarations dans la presse). On peut également ajouter que l’usine a amené des milliers de mouettes et de rats.

Quant à l’environnement local proche, il est bon de signaler qu’il a été défiguré au fil du temps. Les hameaux ont été séparés par l’implantation de deux autoroutes. Les ponts qui étaient sensés les relier ont été détruits (vétusté et défauts de fabrication) et non-reconstruits (pas de moyens financiers). Une route industrielle aussi dangereuse que fréquentée termine le dispositif routier pour l’isolation. Ensuite, TOUS les bois avoisinants ont été rasés pour permettre l’exploitation de la craie par les cimenteries. On peut également noter l’élargissement du canal à 1350T, les cimenteries d’Obourg, l’implantation d’un centre de recyclage d’autos (Comet Sambre) et la future unité de traitement des boues de dragage, dont personne en Wallonie ne voulait !

3. Le nouveau projet HYGEA : l’Ecopôle

D’amblée, la nouvelle Intercommunale mixte annonce la couleur : il s’agit de centraliser toutes les activités de traitement de déchets sur le seul site d’Havré, faisant passer de 85.000T à 263.000 T, la quantité de déchets traités sur le site. De plus, l’ensemble des camions de collectes sera stationné sur le site. On va construire de nouvelles routes internes, un atelier de réparation, une station-service, un camion-wash. On va passer de 50 à 350 travailleurs, ce qui implique la construction de réfectoires, de vestiaires et de douches. La ligne hiérarchique sera également à Havré. Les bureaux existants seront démolis pour être agrandis. Cerise sur le gâteau, on va construire une unité de broyage des déchets encombrants dont on nous dit déjà qu’elle ne produira pas de nuisances supplémentaires...

4. Analyse du Comité des Bruyères.

En premier lieu, nous disons NON à l’implantation de ce méga-projet à Havré !

Les habitants du quartier des Bruyères sont aujourd'hui victimes d'une accumulation de nuisances. En effet, ils sont cernés
* d'un côté par les cimenteries, les carrières et bientôt le traitement des boues de dragages,
* de l'autre par le centre de tri, subissant une série d’agressions dans leur environnement.
* De plus, le quartier est traversé de nombreuses fois par jour par une noria de camions bruyants et polluants
  empruntant les autoroutes et la très dangereuse route industrielle.

Si le centre de tri doit devenir un écopôle, cela va encore nous accabler davantage.
Ne peut-on pas partager les nuisances ? Ne peut-on pas, une fois pour toutes, inscrire comme critère prioritaire du choix d'un site l'absence d'habitants dans un rayon de 500 m ? D'autant plus que la centralité du site d'Havré est loin d'être démontrée et que le terrain est trop petit pour un écopôle..."

Nous avons, en tant que riverains, une expérience de 10 ans sur ce que ce type d’industrie peut engendrer comme nuisances en termes d’odeurs nauséabondes et de bruit. Nous avons constaté également l’incapacité des nouveaux gestionnaires à réduire ou corriger les impacts environnementaux. Technologiquement, ils ne présentent aucune amélioration au système de traitement de l’air, et donc de réduction des nuisances que génèrera inévitablement cette industrie pour les riverains. Ainsi, pour éviter les nuisances olfactives, ITRADEC utilisaient des bio-filtres et l’éolage mais ce système a montré qu’il était totalement inefficace. Hygea propose l’utilisation de bio-filtres couplé à l’éolage, ainsi qu’une unité de lavage de l’air. Ils jugent même inutile de compléter le dispositif du bâtiment par un sas. En définitive, rien ni personne ne peut affirmer que les nuisances subies par les riverains ne se reproduiront plus !

Ce que nous pouvons ajouter, c’est que notre comité fait partie d’un collectif européen d’associations de riverains dont le siège est à Paris et est coordonné par l’ARIVEM. Cette semaine encore, nos collègues d’Angers nous ont confirmé que les installations de leur syndic (Intercommunale), qui ne datent pourtant que de 18 mois et qui sont équipées des mêmes unités de traitement de l’air préconisées par l’auteur de l’étude d’incidences, incommodent fortement le voisinage par des dégagements d’odeurs nauséabondes.

Après analyse de l’étude d’incidences, notre conclusion est que le projet d’HYGEA appelé « ECOPÔLE », s’il est développé sur le site dit du « Champ de Ghislage », aura un impact catastrophique sur le bien-être des riverains. Rappelons que l’étude d’incidences de 1995 pour le projet « ITRADEC » faisait déjà état de 760 habitants dans un rayon de 500 mètres autour de l’usine. Cette population n’a, pour le moins, pas diminué mais la nouvelle étude d’incidences s’est limitée à recenser les riverains à seulement 100 mètres du projet. Nous dénonçons là une tentative malhonnête afin de minimiser les nuisances subies.

Napoléon 1er, le 15 octobre 1810 a promulgué un décret « obligeant d’éloigner les manufactures aux odeurs nauséabondes et incommodantes des quartiers d’habitations » et, 200 ans plus tard, quelques responsables politiques bien identifiés utilisent tous les moyens pour implanter ce type d’industrie au cœur de trois hameaux comprenant plusieurs centaines de personnes. Ce comportement est proprement « éco-irresponsable ».

Le Comité de Défense des Bruyères est profondément affligé de voir le manque d’intérêt et le manque d’action dont font preuve les gestionnaires politiques en matière de gestion de déchets, notamment en matière de pédagogie. Les gestionnaires de l’IDEA ont choisi la facilité il y a 20 ans en écoutant des industriels qui leurs disaient : « Laissez vos citoyens mélanger tous leurs déchets dans une seule poubelle, nous les trierons pour eux ! »

Prendre ses responsabilités n’aurait-il pas été d’investir dans la pédagogie et l’éducation des citoyens sur le tri sélectif des déchets ? Non, lorsque le Comité de Défense des Bruyères a émis cette idée à l’époque, il s’est vu répondre que les citoyens n’étaient pas assez « responsables et volontaires » que pour trier correctement leurs déchets. Il est vrai qu’à l’époque, il était plus facile de faire confiance à une entreprise privée vendant ce type d’usines miracles que de se lancer dans un programme éducatif à grande échelle ! C’était, bien entendu, aussi l’intérêt du secteur privé que de laisser la population en dehors de sa responsabilité citoyenne...

Il faut alors se poser la question de savoir si les Allemands, qui trient correctement leurs déchets depuis longtemps sont plus intelligents que les Wallons des environs de Mons et du Centre ou si ce sont les politiciens et gestionnaires publics de cette région qui sont moins compétents que leurs homologues allemands pour conduire une politique cohérente en vue du traitement des déchets ?

Nous regrettons également qu’une analyse des risques concernant l’unité de bio-méthanisation n’apparaisse pas dans l’étude. Nous avons transmis à l’auteur un rapport sur le danger d’explosivité de ce type d’installation. Elle figure dans les annexes de l’étude.

5. Prise en compte de la problématique financière.

Les représentants politiques que nous avons rencontrés dernièrement reconnaissent unanimement et ouvertement que le choix historique du site d’Havré était une erreur pour implanter le projet « ITRADEC ».

Ils nous ont fait également part de leur embarras face au nouveau projet, chacun étant conscient de l’augmentation des nuisances environnementales que cet « Ecopôle » provoquera pour les centaines de riverains mais étant également convaincu que ce serait une erreur de gestion financière de démonter les installations de bio-méthanisation d’Havré pour les reconstruire dans un site plus approprié.

Bien que, sur le plan humain, la seule décision envisageable pour nous, serait de tout déplacer vers un site mieux adapté, nous devons tenir compte de l’aspect financier et être réalistes, à savoir tenir compte des erreurs de gestion du passé.

Une solution envisageable par notre comité serait alors de conserver les unités de bio-méthanisation existantes et de compostage à Havré et de se tourner vers un site mieux adapté pour le reste des activités, y compris le transfert des ordures ménagères. Cette solution présenterait de nombreux avantages.

Nous vous demandons dès lors de ne pas appuyer ce projet « Ecopôle » sur le Champ de Ghislage et de demander à l’Intercommunale IDEA de proposer un site alternatif dans le zoning de Ghlin-Baudour. Il n’y a, aujourd’hui, plus aucun impératif technique qui pourrait justifier de maintenir l’ensemble de la filière à Havré-Ghislage.

Nous tenons à vous signaler que le Comité des Bruyères est à votre disposition pour vous exposer le point de vue de la population riveraine et vous faire part de son expérience et de ses propositions.

Dans l’attente nous vous prions de croire, Mesdames et Messieurs les membres de la C.R.A.T., en l’expression de nos sentiments les meilleurs.

Pour le Comité de Défense des Bruyères,

Guy Van Craynest, 
Président 

Informations complémentaires sur le site Obourg.info